La marnière, un danger immobilier qui reste méconnu.
Ces cavités souterraines menacent les maisons construites à proximité. Les incidents se multiplient et les consolidations sont très coûteuses.
Si la mérule est une plaie essentiellement bretonne, la marnière est un fléau qui concerne surtout la Normandie. Dans les deux cas de figure, ce sont des cauchemars pour les propriétaires. S’il existe un diagnostic obligatoire pour la mérule dans les régions les régions les plus touchées par ce champignon qui attaque le bois, il est plus difficile de savoir si l’on risque de trouver sous son logement une marnière. Ces cavités ont généralement été creusées au cours du XIXe siècle par des agriculteurs à la recherche de marne, une craie utilisée comme engrais.
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Un risque loin d’être anecdotique, car ces dernières semaines les incidents se multiplient. Le site Actu.fr rapporte ainsi qu’en Seine-Maritime, département français comptant le plus de cavités souterraines, on comptabilise déjà en un mois une dizaine de demandes de subventions pour combler de telles cavités alors qu’en 2020, le département n’a géré que 20 dossiers sur l’année. Il semblerait que les fortes pluies qu’a connues le secteur soient à l’origine de ces nombreux sinistres dans un département où l’on estime que le nombre de marnières déclarées ou non peut atteindre les 80.000.
Des sexagénaires contraints de déménager dans un gîte
La difficulté liée à ces marnières que l’on retrouve également dans les départements et régions voisins (Eure, Orne, Calvados, Bourgogne...) est double: on ne sait pas toujours où elles se trouvent et une fois que le sinistre se déclare les réparations sont coûteuses. La presse locale regorge en effet d’histoires de propriétaires en difficulté pour combler les galeries qui menacent leur maison: comme cette famille avec quatre enfants dont les proches ont lancé une cagnotte en ligne pour aider au financement. Ou encore ce couple de sexagénaires contraints de loger dans un gîte en attendant que les travaux soient effectués. Sans oublier cette famille du pays de Caux qui doit rassembler 110.000 euros pour sécuriser sa maison. Car malgré les subventions locales, effectuer des sondages géologiques puis couler des centaines de mètres cubes de béton se chiffre en dizaines de milliers d’euros.
Pour éviter ces déconvenues, mieux vaut donc ne pas avoir été abusé par un propriétaire qui cache la présence d’une marnière lors d’une vente immobilière. Plusieurs avocats se positionnent sur ce créneau pour défendre des acheteurs escroqués. Il y a quelques mois, les avocats parisiens Lucile Bertier et Alexandre Silva alertaient d’ailleurs dans une tribune sur la recrudescence de ces cavités soigneusement cachées lors d’acquisitions immobilières. Ils rappellent qu’un vendeur qui cache sciemment la présence d’une marnière peut s’exposer à 30.000 euros d’amende. Par ailleurs, ils estiment qu’un acheteur doit se montrer suspicieux lorsqu’on lui présente un affaissement dans le jardin comme une ancienne mare asséchée ou un lieu de compost. Méfiance également en cas de présence d’un puits profond d’une trentaine de mètres ou de fissures profondes affectant un bâtiment.
Responsabilité du vendeur ou du constructeur
Dans tous les cas de figure, mieux vaut être le plus prudent possible, car les recours sont loin d’être simple. Pour se retourner contre le vendeur, il faut ainsi pouvoir prouver qu’il avait connaissance de l’existence d’une marnière... Pour cela, il faudra jouer les détectives avec le voisinage. La chose est un peu plus simple avec une construction neuve, car la garantie décennale s’applique aussi aux dommages résultant d’un vice du sol. La commune garde, enfin, une part de responsabilité car elle doit indiquer dans ses documents d’urbanisme si un terrain présente un indice de marnière. Là aussi, si la commune n’a pas bien fait son travail ou a caché des éléments qu’elle connaissait, il y a possibilité d’obtenir réparation.
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